La remise en question n’est généralement pas la qualité principale de nos politiques. C’est encore moins le cas quand il s’agit de s’en prendre aux propriétaires !
D’une main, on reconnait le caractère approximatif du Certificat PEB en estimant qu’il devrait être corrigé, et de l’autre main on passe la seconde en s’engageant sur la voie de la répression…
Liaison de l’indexation au score énergétique figurant sur le certificat PEB !
Dans le CRI d’octobre dernier, nous évoquions le surréalisme à la belge des certificats PEB. Il en allait de même des discussions en cours dans les 3 Régions du pays visant à limiter ou interdire l’indexation des loyers en fonction du score énergétique mentionné sur le certificat PEB.
Depuis lors, à l’instar de la Région flamande qui fut la première à légiférer sur le sujet, les Régions bruxelloise et wallonne ont suivi.
En résumé, pendant les 12 prochains mois, les loyers ne pourront pas être indexés pour les logements avec un certificat PEB F et G, ils seront limités pour les logements PEB D et E. Les logements scorés PEB A, B, C pourront être indexés normalement. Attention cela varie d’une Région à l’autre (à Bruxelles l’indexation totale est aussi permise pour D).
Et voilà donc que le certificat PEB qui était purement informatif jusqu’à ce jour est devenu en quelques semaines totalement punitif pour des milliers de propriétaires bailleurs.
Il fallait bien faire supporter l’augmentation du prix de l’énergie par quelqu’un et les propriétaires bailleurs étaient une très belle cible facile pour tous les dirigeants politiques des régions concernées. En outre cela permet aux Régions d’éviter de devoir s'accorder sur le budget des aides complémentaires.
En quelque sorte, un impôt déguisé !
Certes, un certain nombre de nos concitoyens et notamment des locataires ont des difficultés pour faire face à la situation actuelle mais en sens inverse, un certain nombre de bailleurs ont besoin de leur loyer indexé pour compléter une pension souvent limitée dans beaucoup de cas et des charges immobilières qui croissent bien plus que l’index « indice santé »
Certificat PEB : une farce déconnectée de toute réalité
Pour rappel, le certificat PEB indique la consommation THEORIQUE annuelle calculée par mètre carré de surface brute de plancher de l'habitation (en kWh d’énergie primaire par m² et par an). Cette valeur ou la classe énergétique basée sur cette valeur, qui se veut plus facile à appréhender, doit permettre à l’acheteur ou au locataire potentiel d’évaluer le caractère économique de l’habitation sur le plan de la consommation énergétique. Plus cette valeur est petite, meilleure sera la classe énergétique et plus faible sera la consommation énergétique de cette habitation par rapport au nombre de m².
Mais la REALITE est toute différente à ce que voudrait nous faire croire le certificat PEB.
Sur base de 3 cas concrets, on observe que la consommation réelle sur plusieurs années est largement inférieure à la consommation théorique calculée et mentionnée sur le certificat PEB.
Un logement scoré PEB G qui ne consomme réellement que 25 ou 30% de la consommation théorique est – il correctement évalué ? Ne doit-il pas avoir un score bien plus faible et se rapprocher des score B, C ou D ?
Dans un article paru dans le journal L’ECHO du 16.09.2022, le cabinet du Ministre Bruxellois de l’environnement, M. Alain MARON (ECOLO), déclarait : « On concède qu’il existe une certaine disparité dans la méthodologie de calcul. La méthode de calcul est commune à 70%, mais des différences subsistent. Toutefois, cette méthode de calcul serait en passe d’être uniformisée. Les régions prévoient d’atterrir en 2025 avec une méthode unique. »
L’Union européenne réfléchit aussi à imposer une réforme, avec, peut-être, à la clé, une forme d’alignement des labels. « On pourrait donc se trouver face à un alignement heureux si on parvient à une méthode de calcul unifiée entre les Régions et ensuite, une directive européenne qui caractérise l’uniformisation des labels PEB », conclut le Cabinet du Ministre de l’environnement.
La Commission européenne propose une révision de la Directive PEB
La Commission européenne travaille depuis 2021 à une proposition de révision de la Directive PEB. Dans un document publié le 15.12.2021 sur le site de la Commission et intitulé « Questions et réponses au sujet de la révision de la Directive sur la performance énergétique des bâtiments », la réponse à la question 5 est éloquente. Nous la reprenons ici :
« 5. Que sont les certificats de performance énergétique et comment seront-ils utilisés ?
La proposition de directive sur la performance énergétique des bâtiments (PEB) comprend des mesures visant à rendre les certificats de performance énergétique beaucoup plus clairs, plus fiables et plus visibles ; ceux-ci contiendront des informations sur la performance énergétique et auront des caractéristiques clés faciles à comprendre, au bénéfice des propriétaires de bâtiments, des investisseurs financiers et des pouvoirs publics. Depuis leur introduction en 2002, la qualité et la fiabilité des certificats de performance énergétique ne cessent de s'améliorer. Néanmoins, des problèmes ont été constatés en ce qui concerne la qualité des procédures et, en particulier, il subsiste une impression de manque de cohérence.
Cette proposition de directive définit plus clairement ce qui est considéré comme un certificat de performance énergétique de bonne qualité, son utilité et comment le délivrer. Les mécanismes de contrôle et la visibilité dans la publicité immobilière sont améliorés. La proposition de directive PEB comprend un modèle de certificat de performance énergétique avec un nombre minimum d'indicateurs communs sur l'énergie et les émissions de gaz à effet de serre... ».
Ceci démontre à quel point le certificat PEB tel que nous le connaissons dans nos 3 Régions du pays est sujet à caution, est peu fiable et basé sur une méthodologie de calcul bien critiquable.
Ne pas tenir compte de la réalité de la consommation du logement est un des éléments capitaux de toute révision de ce certificat qui, rappelons-le, était lors de son introduction purement indicatif.
Le certificat PEB qui est purement informatif ne prévoit en outre aucune procédure de recours.
Ainsi, le propriétaire serait bien en mal d’introduire un recours pour contester le résultat affiché par le certificat. Le propriétaire doit faire « confiance » dans le certificateur énergétique agréé qu’il a désigné. Mais ce contrôle n’est pas équilibré. Il n’y a aucune procédure contradictoire prévue.
Après la punition. Prochaine étape la répression ?
D’informatif, voilà ce certificat PEB devenu punitif. Les loyers sont bloqués voire limités au niveau de leur indexation annuelle.
Et la prochaine étape rêvée par certains serait de réprimer les « mauvais propriétaires » qui louent ce qu’ils désignent comme « passoires énergétiques ».
Il n’y a plus qu’à insérer dans la législation des peines de prison pour ces « mauvais propriétaires » en liant la hauteur de la peine au score énergétique du logement qu’ils donnent en location ou qu’ils occupent eux-mêmes. Il n’y aurait qu’un petit pas à franchir pour aboutir à une telle situation.
La position du SNPC
Le SNPC répète sa position depuis plusieurs mois tant dans son magazine LE CRI que dans les médias (presse écrite, parlée et télévisée).
Le SNPC va introduire différents recours devant la Cour constitutionnelle pour faire annuler ces dispositions décrétales régionales.
Nos avocats y travaillent et à l’heure où vous aurez votre magazine préféré dans vos mains en novembre, les recours auront déjà été déposés.
L’indexation des loyers : enrichissement des propriétaires. Les locataires subissent une double peine ?
La Secrétaire d’Etat au logement (PS) de la Région de Bruxelles-Capitale a affirmé que permettre l’indexation des loyers constituait un enrichissement des propriétaires.
De la bouche d’une responsable politique, c’est une aberration sans nom. Bien sûr cela aura dû faire plaisir à son électorat privilégié.
Les loyers constituent un revenu, n’en déplaisent à certains et il est légitime que comme d’autres formes de revenus (salaires, indemnités et allocations diverses etc.), ils soient indexés d’autant plus dans un pays comme le nôtre qui connait un système automatique d’indexation.
Car les propriétaires – eux – ce n’est pas une double peine mais une quintuple peine qu’ils vont devoir subir.
Ils subissent une inflation - comme tout le monde - liée entre autres aux prix de l’énergie qui ont fortement augmenté. Il n’y a donc pas que les locataires qui souffrent de l’inflation. Les propriétaires – bailleurs ou pas – en souffrent tout autant.
Les charges des propriétaires ne cessent d’augmenter et bien plus fortement que l’inflation basée sur l’indice santé.
En matière d’immobilier, c’est l’indice ABEX de la construction qui prévaut et celui-ci a augmenté bien plus que l’indice santé. L’indice ABEX a augmenté de 78% de plus que l’indice santé sur les 6 dernières années.
Il faut être sourd et aveugle pour ne pas savoir que les matériaux de construction ont augmenté entre 15 et 25% ces derniers mois, que les matériaux d’isolation ont augmenté de près de 35% sur ces mêmes derniers mois.
Mais la Secrétaire d’Etat au logement et les locataires ne le savent pas. Normal, ce ne sont pas eux qui paient les factures….
C’est sur base de l’évolution du l’indice ABEX que chaque année, les primes d’assurance incendie et risques connexes sont indexées.Le précompte immobilier annuel à charge exclusive des propriétaires est calculé sur base du revenu cadastral indexé. L’indexation lissée en 2022 devrait s’établir aux alentours de 9 %. Le précompte immobilier sera donc indexé de 9% en 2023 (l’année suivante).
Aucune mesure n’a été prise par les 3 Régions du pays pour limiter voire bloquer l’indexation du précompte immobilier.
Le précompte immobilier annuel est aussi dépendant des centimes additionnels fixés par les Communes.
En 2022, à titre exemplatif, la Commune d’Evere (majorité PS) a augmenté son précompte immobilier de 18%, soit près du double de l’inflation annuelle connue aujourd’hui.Pour 2023, la Commune d’Ixelles (majorité ECOLO et PS) a pris la décision d’augmenter son précompte immobilier de 17% soit aussi près du double de l’inflation actuelle. Et tablons que d’autres communes bruxelloises et wallonnes ne se priveront pas de procéder à de telles augmentations en 2023 tant leur situation financière est délabrée.
Ici aussi, personne pour s’en inquiéter sauf le SNPC qui stigmatise pour que cesse systématiquement l’augmentation de la fiscalité sur le dos des propriétaires.
La privation de revenus locatifs. En interdisant l’indexation ou en en limitant le pourcentage, les Dirigeants des 3 Régions du pays appauvrissent les propriétaires qui ont besoin de ces revenus locatifs pour vivre et pour payer les frais qu’ils ont à supporter pour maintenir et améliorer leur bien immobilier.
Conclusion
Le Certificat PEB – toutes régions du pays confondues – n’est pas un document pertinent et fiable dans son état actuel pour servir de base à toute législation qui l’utiliserait à des fins réglementaires et de surcroît punitives. La démonstration et les réactions à son propos sont suffisamment éclairantes et évidentes. On est passé de l’informatif à du punitif et demain à du répressif.
Le SNPC et ses membres savent que des investissements importants (placement de châssis double vitrage, remplacement d’une veille chaudière, vannes thermostatiques, isolation du toit, placement de panneaux photovoltaïques, etc.) devront être réalisés dans les bâtiments pour améliorer leur isolation et par conséquent pour diminuer la consommation d’énergie et le coût de chauffage.
Ces investissements sont estimés par certains à plusieurs dizaines de milliers d’euros (la Banque nationale a évoqué dans une étude récente un montant de 50.000 € pour une maison).
Que feront ensuite les propriétaires bailleurs après de tels investissements ? Ils adapteront le loyer demandé à la hausse et pas d’un peu. Un récent test sur base de la grille indicative des loyers sur le site de Bruxelles Logement - Loyers Bruxelles, montrait qu’il y avait une différence de 195 € entre un appartement (2 chambres à Schaerbeek) selon que le score énergétique affiche G ou A. Ce différentiel se vérifie et s’aggrave même quand on consulte les annonces immobilières sur les sites bien connus comme IMMOWEB ou IMMOVLAN.
Et que dire aussi des candidats acquéreurs qui sollicitent un crédit bancaire pour l’acquisition de leur logement et qui présente un mauvais score énergétique ? Les banques sont désormais sensibles à ce score énergétique. Mais comme nous le démontrons, ce score n’est pas du tout fiable et pertinent et ne représente pas du tout la réalité de la consommation annuelle.
Enfin, il est regrettable et déplorable aussi que certains font un double amalgame.
Le premier amalgame est qu’une « passoire énergétique » est un « taudis ». Oui, les taudis sont probablement des passoires énergétiques. Mais non, tous les logements avec un mauvais PEB – PEB contestable et contesté - ne sont pas des taudis et loin de là.
Le second amalgame, c’est de considérer que les propriétaires-bailleurs sont des multipropriétaires à assimiler à des multinationales.
C’est ridicule mais le discours plaît. Car comme il faut taxer les superprofits des multinationales (plus facile à dire qu’à faire), pourquoi ne pas vouloir aussi taxer ou faire supporter des charges ou limiter les revenus locatifs sur ces multipropriétaires (plus facile à dire et à faire)?
L’interdiction et la limitation de l’indexation des loyers seront combattues par le SNPC. Les recours sont en voie de rédaction et seront déposés sous peu devant la Cour constitutionnelle.
Ce qui ressort de tout ce débat, c’est que demain, dans un horizon de 3 à 5 ans, la crise du logement à Bruxelles sera encore plus aigüe qu’aujourd’hui. Les performances énergétiques seront améliorées progressivement, les loyers augmentés et les locataires ne pourront certainement pas ou plus se loger à un loyer abordable. Et ce n’est pas la région bruxelloise, exsangue de moyens et endettée jusqu’au cou, qui sera en mesure de faire sortir du sol des milliers de nouveaux logements sociaux. Depuis 20 ans, le nombre de logements sociaux plafonne à +/- 40.000 malgré toutes les promesses des Gouvernements qui se sont succédés pendant cette période. Et ajoutons que parmi ces 40.000 logements sociaux, 4.600 sont selon les derniers chiffres actuellement vides alors que la liste d’attente en est aussi longue avec plus de 50.000 demandeurs. Un comble, ne trouvez-vous pas ? Enfin, c’est notre avis….