Nous avons retenu ci-après les principales mesures susceptibles d'impacter les propriétaires et les bailleurs. Mais pour ne pas changer, il est à nouveau question de mettre en place un nouveau dispositif régional de lutte contre les logements inoccupés ou encore de simplifier le droit de gestion publique pour lutter contre ces derniers.
Le SNPC n'a aucun problème pour ce qui est de lutter contre les logements inoccupés mais que l'on s'occupe prioritairement des logements et bâtiments publics concernés. Il y a en la matière un véritable tabou qui n'est pas défendable. Il y a de l'aveu même des pouvoirs publics bruxellois et de sa secrétaire d'Etat au Logement plus de 4.000 logements sociaux inoccupés sur un stock de moins de 40.000 !
Pour les mesures qui suivent outre de rependre ce qui figure à leur sujet dans le plan d'urgence - in fine nous reprenons les réactions du SNPC.
Action 19 : Développer une gestion plus dynamique de la grille indicative des loyers
La grille indicative des loyers doit être basée sur des données les plus récentes possibles pour qu'elle puisse être considérée comme un outil fiable pour la mise en œuvre de certaines politiques.
Début 2020, un marché public pour la révision de la grille des loyers sur base des enquêtes de l'Observatoire des Loyers plus récentes (2017, 2018 et 2020, 15.000 enquêtes) a été lancé. L'objectif de cette mission était d'actualiser la grille indicative des loyers en appliquant la méthodologie existante, mais en y apportant également des améliorations (plus de critères relatifs au bien et à son environnement direct).
Sur la base d'une première analyse de la nouvelle équipe de recherche (ULBIGEAT), il apparaît que la méthodologie utilisée pour l'élaboration de la grille actuelle doit être améliorée. En outre, les enquêtes de l'Observatoire des loyers 2020 ont été retardées en raison de la crise COVID-19. Dès lors, la grille ne sera révisée qu'en décembre 2021.
Une base de données centralisée permettant d'avoir une image fidèle du marché locatif (baux, loyers, garanties, état des lieux, PEB, permis, etc.) sera mise en place au travers de protocoles d'accord avec les différentes institutions concernées (administrations publiques. régionales et fédérales, secteur bancaire).
Une campagne de communication sera lancée au début de l'année 2022 pour mieux faire connaître la grille indicative des loyers.
Réaction du SNPC
Des constats faits par le SNPC, l'actuelle grille indicative des loyers est loin de refléter l'état des loyers en Région de Bruxelles-Capitale. En outre il apparaissait clairement qu'elle avait été construite pour tirer les loyers vers le bas.
Le SNPC n'est pas contre le principe d'une grille indicative mais pour autant qu'elle soit établie sur base de critères objectifs. En comparaison, le travail fait en Région wallonne l'avait été de manière plus sérieuse.
La majorité bruxelloise dès son installation en avait fait le constat également d'où les manœuvres annoncées ci-avant. Le problème c'est qu'ils brûlent d'impatience d'en faire une grille contraignante. Ce que le SNPC ne peut ni envisager ni accepter.
Action 20 : Mise en place d'une commission paritaire locative chargée d'examiner la justesse du loyer
Une commission paritaire locative consultative sera constituée et chargée d'évaluer la justesse des loyers à la demande de toute personne intéressée ou du juge de Paix saisi d'une demande de révision du montant du loyer abusif. A cet égard, la grille indicative de loyers sera un des outils permettant d'évaluer le caractère abusif ou non d'un loyer.
Dans un contexte critique d'accessibilité des Bruxellois à un logement décent, la mission d'évaluation de la justesse du loyer présente une utilité particulière pour chacune des parties.
Réaction du SNPC
Le SNPC ne participera pas à ce qu'il considère comme la mise en place d'une forme de soviet locatif d'autant plus qu'il veut éviter à terme que d'aucuns cherchent à y substituer tout recours à la justice dans le cadre des contentieux locatifs et notamment en cas de non règlement des loyers.
Le SNPC a clairement fait savoir son opposition et déjà sous la précédente législature. D'autant plus qu'il voit mal des locataires et bailleurs lambdas avoir la compétence pour apprécier la justesse du loyer sans compter qu'il faut encore savoir par rapport à quoi. Et là, on sent déjà poindre les dérives.
A l'origine des réflexions, il s'agissait de le faire en fonction de l'état du bien et ses qualités propres. Il était question de loyers abusifs qui soit dit en passant ne concernerait qu'une dizaine de pourcents du marché locatif privé. Si tel est le cas, des recours en justice sont déjà possibles et les juges de paix peuvent réduire des loyers au nom de la théorie de troubles de jouissance.
Si c'est en fonction des revenus des locataires, où va-t-on ! Mais il est vrai que d'aucuns voudraient voir fixer les loyers dans le privé comme dans le logement social. Si c'est sur base de la grille, elle est indicative et doit le rester, dès lors on voit mal une commission pouvoir se prononcer sur cette base. En tout état de cause ce n'est pas parce qu'un loyer dépasse la grille qu'il est abusif.
Action 22 : Proposer un système de conventionnement pour assurer des loyers abordables sur le marché privé locatif
Le conventionnement est un engagement du bailleur à louer un logement qui répond à plusieurs conditions cumulatives telles que :
le loyer est raisonnable et correspond à un pourcentage des loyers repris dans la grille indicative des loyers ;
le bien répond aux exigences de sécurité, de salubrité et d'équipements définies en exécution de l'article 4 du Code du Logement ;
autres (par ex. contrat de bail enregistré).
L'objectif poursuivi est donc d'inciter les bailleurs à se conventionner en leur octroyant divers avantages (ex : accès aux primes à la rénovation en plus des primes à l'énergie pour les bailleurs conventionnés).
à l'image des logements conventionnés auprès de l'Agence Nationale de l'Habitat en France, plus la remise sur le loyer est élevée (par ex. conventionnement ‘intermédiaire' ou ‘social'), plus l'aide offerte aux bailleurs sera importante.
La constitution d'un Fonds « assurance loyer garanti » sera examinée afin de protéger les bailleurs conventionnés. Quels sont les objectifs de la politique de conventionnement ?
A court terme, encourager les bailleurs à:
appliquer un loyer raisonnable
augmenter le nombre de logements abordables (loyer inférieur au loyer de référence, loués aux ménages à revenus modestes)
améliorer la qualité du parc locatif (via les primes à la rénovation et les primes énergie)
A moyen terme : contrecarrer la hausse des loyers.
Réaction SNPC
Pour le SNPC, il faut craindre « le piège à cons » en d'autres termes faire croire aux bailleurs à une série d'avantages mais qui en fait n'existeront pas ou encore avec des contraintes réduisant considérablement leurs droits sur leurs biens (voir notamment l'obligation par exemple de faire des baux de longue durée). Ils font déjà état comme condition que le bail devra être enregistré, formalité dont tout le monde s'interroge de l'intérêt.
En outre que faut-il entendre par loyer raisonnable ? Par rapport à quoi ? Il n'est déjà plus question d'une référence pure et simple à la grille indicative. Nous ne serions pas étonnés qu'il soit demandé aux bailleurs qui voudraient être conventionnés de fixer un loyer plus en phase avec les revenus du locataire et, en fin de compte, les bailleurs pourrontt-ils encore choisir ce dernier ?
Rappelons que le programme du précédent gouvernement prévoyait outre une nouvelle législation en matière de baux dans le cadre de la régionalisation intervenue, des mesures pour lutter contre les arriérés de loyers. Nous attendons toujours.....car il n'y a absolument rien de rien dans le Plan d'Urgence pour le Logement.
Par ailleurs, déjà en l'état, la plupart des bailleurs appliquent un loyer raisonnable et louent des biens répondant aux exigences de sécurité, de salubrité et d'équipements. Dès lors pourquoi devraient-ils être conventionnés pour bénéficier de différents avantages telles que des primes à la rénovation ? Une approche analogue peut être retenue pour l'indemnisation des bailleurs privés en cas de moratoire sur les expulsions durant l'hiver (voir action 28).
En outre, nouveau leurre, il est fait état d'un fonds « assurance loyer garanti » mais sans engagement formel et définitif. La sémantique est claire : il sera « examiné »...
Action 28 : évaluation de l'ordonnance bail et de la réglementation relative aux expulsions
Le gouvernement entend garantir l'accessibilité et l'effectivité des droits, aides et recours en matière d'accès au logement, de prévention de l'expulsion, de solution d'urgence et de relogement suite à une expulsion et de lutte contre la discrimination.
Une évaluation concrète de l'Ordonnance relative à la régionalisation du bail d'habitation du 27 juillet 2017 sera réalisée, notamment sur les points suivants :
Rupture du contrat de bail : le preneur dont le contrat de bail est résilié sans motif a droit à une indemnité
Justesse du loyer : encadrement des conditions et modalités de l'exercice du droit de révision du loyer (cf Action 20 : mise en place d'une Commission paritaire locative chargée d'examiner la justesse du loyer)
Sanction de la violation du droit de propriété par le bailleur
Limitation du recours au contrat de bail de courte durée
Dans ce contexte, une attention particulière sera donnée à la question de l'effectivité du droit au recours pour les personnes précarisées. En effet, l'utilisation des procédures de recours en cas de refus d'un droit est très rare pour les personnes précarisées.
En ce qui concerne les expulsions, un monitoring des expulsions sera établi afin de mieux prévenir et lutter contre celles-ci. La loi « d'humanisation sur les expulsions» de 1994 sera notamment évaluée et son dispositif amélioré au travers du Code bruxellois du Logement. L'obligation de signification des jugements d'expulsion sera ainsi étendue aux baux de résidence principale.
Un moratoire hivernal pour tous les logements publics sera mis en place à l'instar de ce qui se fait déjà dans les logements sociaux.
La mise en place d'un moratoire hivernal pour les logements privés sera examinée.
Parallèlement, la création d'un fonds de prise en charge des arriérés de loyers sera évaluée (cf. Action 23 : proposer un système de conventionnement pour assurer des loyers abordables sur le marché privé locatif).
En effet, l'augmentation de la proportion du loyer dans les revenus des ménages a pour conséquence qu'un nombre croissant de personnes n'arrivent plus à payer leur loyer. On peut ainsi parler d'un décrochage des loyers par rapport à l'indice santé de 2% en moyenne par an depuis 2004.
Quelque 90% des expulsions ont en effet pour motif un arriéré de loyers. Une expulsion coûte en outre beaucoup plus cher à la collectivité que quelques mois de prise en charge du loyer. Les propriétaires pourraient obtenir du Fonds le remboursement d'une partie des loyers impayés et ce, moyennant le respect de certaines conditions.
Réaction du SNPC
La nouvelle législation en matière de baux est à peine entrée en vigueur que l'on veut déjà la modifier et il est clair que le but exclusif recherché est de réduire à nouveau les droits de bailleurs. Toutes les mesures préconisées vont en ce sens.
Nous pouvons d'ailleurs nous interroger pour savoir sur quels critères, quelle évaluation, les points mentionnés ci-avant ont été retenus. Manifestement des choix sont déjà faits mais ce ne sont pas ceux du SNPC.
En tout état de cause, le SNPC ne voit pas quels sont les aspects de l'actuelle législation qui poseraient problème et il n'est pas acceptable de vouloir modifier en permanence la législation au risque de créer l'insécurité juridique.
Pour ce qui est d'un moratoire sur les expulsions dans le privé, le SNPC est contre et de voir déjà comment le Gouvernement bruxellois en a abusé dans le cadre de la pandémie en regard de ce que faisait la Région wallonne et la Région flamande.
Par ailleurs, si demain d'aucuns voulaient étendre le moratoire au privé, ce sont tous les bailleurs qui devront être indemnisés et pas uniquement les conventionnés (il y aurait là en regard de la mesure de base, c'est-à-dire le moratoire, une discrimination manifeste) et ce sera pour tous les impayés pendant la période concernée.
Il est totalement indécent dans le chef du Gouvernement bruxellois de parler « du remboursement d'une partie des loyers impayés et ce moyennant le respect de certains conditions ».
Action 32 : mise en place d'un droit de préférence pour les locataires d'un logement mis en vente
Les locataires dont le logement serait mis en vente pourront bénéficier d'un droit de préférence. Lorsque le bailleur souhaitera vendre le logement loué, celui-ci adressera au locataire un congé indiquant le prix et les conditions de la vente projetée. Le locataire aura un délai de 2 mois pour réaliser l'acte de vente.
Ce mécanisme est appliqué en France depuis 1989 selon les modalités suivantes : lorsqu'un bailleur souhaite vendre son bien, il donne un « congé pour vente » à son locataire 6 mois avant la fin du bail. Ce congé est accompagné d'une offre de vente, si le locataire l'accepte il dispose alors d'un délai de 2 mois pour remettre une offre d'achat. Si le locataire refuse l'offre de vente et que le bien est finalement vendu à un tiers à un prix inférieur à celui proposé initialement par le bailleur, le propriétaire ou le notaire sont tenus de soumettre la nouvelle offre de vente au locataire. Celui-ci a alors un mois pour se prononcer.
Ce mécanisme sera transposé dans le Code du Logement en tenant compte des spécificités bruxelloises
Réaction du SNPC
Contrairement à ce que le plan précise et disons-le clairement c'est un mensonge, le SNPC n'a jamais été consulté sur une telle mesure qui d'ailleurs avait été recalée lors de la précédente législature lors de l'adoption de la nouvelle législation en matière de baux.
Il sera aussi noté que ce point ne figurait pas dans le programme de l'actuelle majorité et c'est donc un rajout. Alors même que d'aucuns avaient précisé, ce sera l'accord et rien que l'accord, nous sommes bien au-delà et le SNPC ne peut regretter que DEFI et l'Open VLD aient baissé la garde à ce sujet.
En outre, pourquoi un bailleur voulant vendre son bien devrait-il donner congé à son locataire ? Le SNPC n'a jamais demandé de mesure de ce type. Qui dit que le nouveau propriétaire ne veut pas faire un placement et conserver le locataire ? Et si demain, le bailleur change d'avis et ne veut plus vendre... ce qui est encore son droit. Il ne faudrait pas non plus interdire à un bailleur de vendre son bien avant la fin du bail ce que le texte ci-avant laisse entendre. Et quid d'une maison de rapport à vendre avec plusieurs appartements et plusieurs locataires ? Et quid encore si ce sont des colocataires ?
Pour le surplus, il est clair que ce droit de préférence va entraîner des retards conséquents et de nombreuses incertitudes lors de vente de biens. En conclusion, le SNPC est contre.
En complément : le CDH et le plan d'urgence logement
Nous reproduisons ci-après l'un ou l'autre passage de la réaction du cdH sous la plume de Madame Céline Fremault, cheffe de groupe, au plan d'urgence Logement et qui vont dans le sens du SNPC :
“Nous nous retrouvons face à un “Xième”
Plan qui se caractérise par un virage “à gauche toute” avec des choix idéologiques très marqués et qui clivent fortement au lieu de rassembler locataires et propriétaires – ce que les temps actuels obligent encore plus – et toute une série de rendez-vous largement manqués.
Notons que le Gouvernement actuel s'obstine sur de fausses bonnes idées comme la mise en place d'une commission paritaire locative dont il a été démontré par une étude approfondie indépendante sous la précédente législature (Université St Louis) qu'elle ne conduirait qu'à un échec puisqu'une partie des acteurs concernés (le Syndicat des propriétaires) l'écartait d'emblée.
La Secrétaire d'état a persisté lors de la présentation du PUL en commission avançant d'autres études mais sans mentionner aucune référence.
La notion de conventionnement pour des loyers abordables est totalement floue : elle tend vers un encadrement des loyers qui n'ose pas dire son nom une fois que le dispositif de conventionnement aura démontré son inefficacité – grilles des loyers devant être adaptée en urgence (celle-ci date de 2017 et sa modification n'est annoncée qu'en 2022, absence de leviers en vue de révision du loyer incriminé,...).
Par ailleurs, pour obtenir le conventionnement, il faudra se conformer à des critères de salubrité, de sécurité,...or, le cdH a fait remarquer en commission que ce sont des obligations légales.
Le droit de préférence est aussi mis sur la table : il s'agit de permettre à un locataire d'accéder prioritairement à la vente du bien qu'il occupe. La procédure évoquée est compliquée et aucun lien n'est fait avec l'aide concrète apportée aux locataires pour acquérir comme un accès renforcé au Fonds du Logement.”