Comme annoncé dans de précédents articles, le CoDT connaît sa première réforme conséquente depuis son adoption en 2017. Ainsi, le 19 décembre 2023, le Parlement wallon a voté le texte du « décret modifiant le Code du Développement territorial et le décret du 6 novembre 2008 portant rationalisation de la fonction consultative et abrogeant le décret du 5 février 2015 relatif aux implantations commerciales » . (Le texte est sur le site du Parlement wallon. Il n’est pas encore publié au Moniteur belge au jour de la rédaction du présent article.)
Son entrée en vigueur est prévue le 1er avril 2024.
Pour rappel, cette réforme répond à 4 enjeux de la Déclaration de politique régionale 2019-2024 et fait suite aux événements subis ces dernières années, notamment les inondations et la crise Covid :
adapter le CoDT aux objectifs de réduction de l’étalement urbain et de l’artificialisation en créant le concept novateur d’optimisation spatiale ;
améliorer le CoDT, en tirant parti de l’expérience acquise depuis sa mise en œuvre ;
procéder à l’abrogation du décret du 5 février 2015 relatif aux implantations commerciales, ce qui a pour conséquence que les futurs permis d’implantations commerciales deviendront des permis d’urbanisme ;
proposer de nouvelles mesures en matière de lutte contre les inondations et intégrer les recommandations de la commission d’enquête parlementaire chargée d’en examiner les causes ;
Dans le présent article, nous aborderons essentiellement les principales modifications intervenues quant à la procédure des permis d’urbanisme/urbanisation, destinées à améliorer la pratique et assurer la sécurité juridique. Nous reviendrons, dans une prochaine édition, sur les autres volets de la réforme.
Une procédure plus efficiente
Lors du dépôt d’une demande de permis, le délai imparti à l’autorité pour délivrer l’accusé de réception complet/incomplet (article D.IV.33) passe de 20 à 30 jours.
Les délais impartis au Fonctionnaire délégué, lorsqu’il est l’autorité compétente pour statuer, sont alignés sur ceux du Collège communal. A titre d’exemple, les délais actuels de 90 jours et 130 jours sont réduits à 75 et 115 jours (article D.IV.48).
Lorsque le collège communal est compétent pour statuer, l’avis du Fonctionnaire délégué doit être rendu dans un délai de 30 jours et non plus 35 (article D.IV.39).
Les délais de consultation des différentes instances sont tous fixés à 30 jours (sauf pour le service Incendie).
Assouplissement de certaines contraintes
Le régime des plans modifiés est revu.
Actuellement le demandeur de permis ne peut d’initiative introduire des plans modifiés en première instance, mais uniquement moyennant accord de l’autorité compétente pour statuer (articles D.IV.42 et 43).
Désormais, il pourra le faire d’initiative, ou à la demande de l’autorité. Ces plans modifiés seront soumis à de nouvelles mesures de publicité (annonce de projet ou enquête publique), sauf dans les 2 hypothèses suivantes :
« 1° lorsque la modification projetée ou le complément de notice résulte d’une proposition ou d’une critique contenue dans les observations ou réclamations faites lors de l’enquête publique ou pendant la période d’annonce de projet ou qui s’y rattache directement ;
2° lorsque la modification projetée n’a qu’une portée limitée et ne porte pas atteinte à l’objet et à l’économie générale du projet et à ses caractéristiques substantielles. »
Il en ira de même dans le cadre de la procédure de recours, moyennant certaines conditions.
Pour éviter des dénaturations importantes de la demande de permis, ce mécanisme ne pourra être utilisé qu’une seule fois pour une même demande et par instance.
La réforme prévoit également la création d’un permis modificatif, avec une procédure allégée pour permettre au bénéficiaire du permis de déposer une demande limitée à la modification projetée (article D.IV.96).
Le permis pour création de logements dans une construction existante pourra être accordé pour une durée limitée (article D.IV.80).
Renforcer la sécurité juridique
Le collège communal ne devra plus que valider le contrôle de l’implantation, permettant soit à son service technique d’y procéder, soit d’autoriser le bénéficiaire du permis à recourir aux services d’un géomètre pour ce faire.
Le régime des infractions est revu :
La référence à la date du 1er mars 1998 qui conditionnait la présomption irréfragable de conformité des actes et travaux réalisés (article D.VII.1bis) est supprimée pour laisser place au régime d’infractions mineures et majeures, avec une présomption irréfragable de conformité des travaux 10 ans ou 20 ans après leur achèvement (sauf certaines hypothèses).
En cas d’infraction, l’avertissement préalable fixe un délai de mise en conformité entre 1 mois (et non plus 3 mois) et 2 ans.
La transaction ne peut plus être proposée qu’après la régularisation (article D.VII.18) « pour permettre à l’autorité d’être pleinement informée du caractère effectivement régularisable ou non des infractions ».
Mieux utiliser les forces vives
Les fonctionnaires et agents techniques « statutaires ou contractuels » pourront être désignés comme agents constatateurs habilités à dresser des PV d’infractions (article D.VII.3).
Le régime des charges d’urbanisme est revu pour assurer une mise en œuvre plus égalitaire :
Possibilité d’imposer des charges en numéraire, en outre des charges en nature ;
Possibilité d’autoriser les charges en nature dans une autorisation distincte du permis ;
Possibilité d’imposer la création de logement d’utilité publique, et notamment lorsque le projet porte sur au moins 30 logements neufs, 40% devra être affecté à des charges en lien avec le logement d’utilité publique.
Tirer les leçons du Covid
La réforme consacre la dématérialisation des process, qui a été instituée pendant la crise covid.
Les auditions de la Commission d’Avis sur les recours pourront se tenir en visioconférence, de même que certaines réunions de projets, des réunions du Pôle Aménagement ou de CCATM, ou encore les réunions d’informations préalables.
Des possibilités pour le public de participer à distance aux mesures de publicité sont également intégrées dans le CoDT, en permettant une consultation à distance lorsque la commune dispose d’une version informatique du dossier.
Voilà donc un aperçu des modifications dans la partie décrétale du CoDT. La partie règlementaire, avec ses arrêtés d’exécution, est toujours en cours d’examen.