Jusqu’en 1975 la propriété immobilière était bien protégée par le Code civil. Elle constituait l’aboutissement d’une épargne durant de nombreuses années. On considérait aussi à cette époque que la propriété immobilière provenant d’une succession était une valeur à respecter, car elle est le résultat du travail de nos ascendants.
1. Pourquoi la création du Syndicat National des Propriétaires en 1975 ?
Peu de gens se souviennent des lois votées après la dernière guerre mondiale en raison de la pénurie de logements qu’il y avait en Belgique, surtout dans les grandes villes qui avaient été bombardées. Suite à cette pénurie, les gouvernements de l’époque ont voté plusieurs lois qui empêchaient aux bailleurs de mettre fin au bail et modéraient les loyers.
Quand les séquelles de la guerre furent absorbées, la liberté contractuelle revint.
Cette liberté permit à l’investissement immobilier de se développer de façon importante, y compris la construction de logements par des personnes privées, afin de se constituer une épargne. Cela valait surtout pour les indépendants.
La population et les gouvernants étaient conscients du fait que l’épargne en général était le fruit du travail, parfois de plusieurs générations.
Investir cette épargne dans un ou des immeubles était un comportement civique. Le locataire trouvait à se loger et le propriétaire-bailleur recevait une rémunération équitable.
La loi de l’offre et la demande jouait son rôle et l’investissement immobilier se poursuivant, les excès des bailleurs n’étaient pas possibles.
A partir des années 1975 ces valeurs fondamentales commencèrent à être dévalorisées pour plusieurs raisons qu’il serait trop long de vouloir expliquer.
De 1960 à 1975 l’inflation était relativement modérée, mais, dès le premier choc pétrolier, elle augmenta jusqu’à atteindre certaines années 13 à 14 %.
Les loyers étaient traditionnellement indexés, soit par l’existence de baux écrits qui la prévoyait, soit par l’adaptation, en général annuelle, des loyers en cours à l’initiative des propriétaires. En effet, les préavis qui pouvaient être donnés aux locataires étaient très courts et si l’augmentation considérée comme légitime des loyers était refusée, le propriétaire pouvait donner congé à son locataire. Ce procédé fut cependant critiqué car il entraînait une augmentation des loyers.
L’indexation quasi automatique concernait aussi les salaires, mais parfois, si pas souvent, avec un certain retard, ce qui, il est vrai, pouvait mettre des locataires en difficulté. Certains propriétaires finirent par augmenter leur loyer plusieurs fois par an…
C’est à cette époque que divers mouvements politiques considérèrent que la réadaptation des loyers créait des charges trop élevées pour les locataires et un enrichissement non justifié des propriétaires.
Ce raisonnement était en réalité faux, car les charges des copropriétaires augmentaient plus que l’inflation.
Pour le gouvernement de l’époque, le plus simple sembla être de bloquer les loyers qui n’étaient pas considérés comme étant, en principe, essentiels pour l’équilibre financier des propriétaires.
C’est donc le 10 avril 1975 qu’une loi sur le blocage des loyers fut votée.
2. Comment les propriétaires réagirent-ils à cette loi qui leur fut imposée sans la moindre concertation ?
A cette époque il n’existait quasi pas de mouvement défendant les intérêts des propriétaires.
Il existait bien une vénérable Fédération Nationale des Propriétaires de Belgique, mais celle-ci se montra bien discrète dans la défense des propriétaires.
Lors d’une assemblée de la « Chambre Immobilière du Brabant » (les agents immobiliers) tenue en mai 1975 deux membres prirent la parole estimant que les agents immobiliers doivent soutenir un vaste mouvement des propriétaires et s’opposer à cette loi, défendant par là même le droit de propriété et son utilité première pour l’équilibre de la société.
Il s'agissait de Jacques WALCKIERS et Gérard van RIJCKEVORSEL.
Ces deux agents immobiliers créèrent à Bruxelles un « SYNDICAT DES PROPRIETAIRES » en mai 1975.
Ils apprirent qu’à Liège le notaire Yves de SENY avait créé un groupe de défense des propriétaires, s’appelant « Mouvement pour la propriété immobilière », alors qu’à Anvers un agent immobilier Hubert MORIAU avait également créé un syndicat avec les mêmes idées, soit l’AES (Algemeen Eigenaars Syndikaat).
En septembre 1975, ces 4 professionnels de l’immobilier se rencontrèrent et décidèrent de créer un « Syndicat National des Propriétaires » comportant trois régionales : Bruxelles, la Wallonie et la Flandre.
3. Manifestation des propriétaires le 28 novembre 1975
A l’initiative du Syndicat National des Propriétaires à peine créé, un millier de propriétaires se réunirent le 28 novembre 1975 dans la salle de la Madeleine à Bruxelles pour s’opposer au blocage des loyers.
Les 4 fondateurs du syndicat avaient énormément travaillé pour faire la publicité de l’existence même du syndicat, trouver les premiers membres et faire entendre la voix des propriétaires immobiliers.
Tous les propriétaires contactés par eux furent chargés de mettre en route la boule de neige, de sorte qu’en quelques mois, le SNP (actuellement SNPC) compta plusieurs milliers de membres.
Suite à son intervention, les loyers furent progressivement libérés, avec cependant une modération de l’indexation (une fois l’an maximum) et des taux d’indexation inférieurs à l’inflation.
C’est suite à cette manifestation que le mouvement s’amplifia et commença à être entendu par les politiques.
Chaque propriétaire, membre du S.N.P. fut invité à donner les noms et adresses d’autres propriétaires.
C’est ainsi que de nombreux propriétaires se firent membres du S.N.P.
Des propriétaires, tous bénévoles, se chargèrent des tâches administratives et des appels téléphoniques.
La loi de blocage des loyers fut modifiée et il faudra attendre des années pour qu’une nouvelle loi sur les baux intervienne et prévoie notamment l’indexation des loyers une fois par an et la mise au point d’un bail de résidence principale qui préserve de façon plus ou moins équilibrée les droits des propriétaires et des locataires.
4. Evolution du Syndicat National des Propriétaires
Très rapidement, dès 1975, LE CRI fut imprimé, parut tous les mois, de même d’ailleurs que le EIGENAARS MAGAZINE pour la Région flamande.
Des antennes régionales avec bureaux, services aux membres, ventes de brochures et de baux, etc. s’ouvrirent aux quatre coins du pays, d’abord et bien entendu à Bruxelles, Anvers et Liège.
Ensuite, des bureaux furent créés en Brabant wallon, à Charleroi, La Louvière, Arlon, Mons et Namur.
Le SNP ouvrit des permanences juridiques pour les membres et mit sur pied des consultations téléphoniques.
5. Implications des bénévoles
Ils furent nombreux à être recrutés et certains sont toujours actifs au sein du SNPC, les autres étant malheureusement trop âgés ou décédés.
Nous ne pouvons citer toutes les personnes qui participèrent aux premières réunions du comité de direction.
Citons cependant parmi eux : Pierre DE BREMAECKER, Gaston SPIEGELS et Alfred DEVREUX. Ces deux derniers furent président national du SNP.
C’est en 1980 que le notaire bruxellois Jean-Pierre de CLIPPELE fut nommé président national.
Il eut plusieurs successeurs, notamment son fils Olivier de CLIPPELE, bien connu de nos membres et actuel Vice-Président.
Les dirigeants, tous bénévoles, se réunirent très fréquemment. Actuellement, une assemblée générale se tient chaque année et des conseils d’administration chaque mois.
Le syndicat, qui resta une association de fait pendant de nombreuses années, se transforma en ASBL, ce qui devenait indispensable vu l’ampleur de l’activité.
Très rapidement des comités locaux et régionaux sont créés, et ceci parallèlement aux bureaux locaux précités.
Ces divers comités sont composés de propriétaires bénévoles qui apportent leur aide au SNPC.
Il nous est difficile de citer ici les noms de tous ces bénévoles. Nous citerons Bernard ROBERTI qui a été Président de la Régionale Wallonne et Président National, Alfred DEVREUX qui a été Président de la Régionale Bruxelloise et Président National, Michel ARCHAMBEAU qui est resté de nombreuses années Président de la section du Brabant-Wallon et a qui succéda Vanessa PAUWELS, Yan MATTHIJS et Pierre ROUSSEAUX pour Charleroi, Raoul BAURAIN pour La Louvière, Jean BATAILLE de LONGPREY, Jean SAINT-GHISLAIN, Baudouin HAMBYE, Stefano PULEO pour la région de Mons, Richard HAHN pour Arlon, Jean-Pierre LEPAPE et Jean-Jacques LOUMAYE pour Namur et, bien sûr, pendant toutes ces années, Olivier HAMAL pour Liège, qui est notre président national depuis pas mal d’années.
6. Quelles furent les activités du SNPC pendant toutes ces années ?
Péréquation cadastrale
En 1979, il fut question d’une péréquation cadastrale. En effet la loi prévoit que tous les 10 ans une révision complète de tous les revenus cadastraux en Belgique doit intervenir, pour les adapter à l’évolution des loyers, suivant les localités.
L’administration du cadastre, sur instruction gouvernementale bien entendu, modifia les revenus cadastraux en se basant sur la valeur locative présumée atteinte le 1er janvier 1975.
Très vite les propriétaires de l’ensemble du pays constatèrent que ces nouveaux revenus cadastraux étaient très élevés, surtout dans certaines villes ou quartiers. N’oublions pas que la base de la taxation, même pour des biens non donnés en location et occupés par le propriétaire, est le revenu cadastral. Par conséquent, le précompte immobilier augmentait considérablement par le simple jeu de la péréquation, mais aussi et en même temps par la nécessité pour les communes, les provinces et ensuite les régions de se financer à l’aide de cet impôt.
Le Syndicat National des Propriétaires se mobilisa et diverses manifestations furent organisées, notamment une très importante à la Madeleine à Bruxelles. Il y eut 400.000 réclamations de la part des propriétaires conseillés en ce sens par le SNPC.
Beaucoup aboutirent et le tollé suscité par cette péréquation amena les gouvernements ultérieurs à ne plus prendre une telle initiative, tout en indexant cependant le revenu cadastral d’abord forfaitairement et ensuite sur base de l’indexation générale et, ensuite, sur base de l’indice des prix à la consommation.
Les autres combats du SNP (devenu SNPC en 2011)
Ceux-ci furent innombrables et il est impossible de les énumérer tous.
En 2005, Jacques WALCKIERS et Alfred DEVREUX qui présidait à cette époque le SNPC, les rappelèrent dans un numéro spécial du CRI.
En bref, ces combats concernaient les copropriétés, les ascenseurs et leur réglementation, le droit de préemption, de réquisition et de gestion publique, la fiscalité en général et plus spécialement la volonté de certains de taxer les loyers réels.
Pendant toutes ces années, le SNPC augmenta le nombre de ses services, notamment le service juridique qui prit une ampleur considérable et constitue une véritable référence pour les propriétaires.
Il organisa et organise toujours un grand nombre de formations pour les propriétaires et tint de nombreuses conférences, actuellement en présentiel ou en vidéoconférence.
Plus généralement, entre 2005 et aujourd’hui, sous la direction d'Alfred DEVREUX et ensuite d'Olivier HAMAL, actuel président, le SNPC poursuivit son combat en faveur de la propriété privée immobilière et fit face aux nombreux projets visant à brimer celle-ci.
Les régions wallonnes et surtout bruxelloises firent et font toujours preuve d’une imagination débordante quand il s’agit d’attaquer la propriété privée et les propriétaires immobiliers, sous prétexte de défendre la partie présumée faible. Cette position est une erreur de principe et économique.
Si l’impôt tue l’impôt, la défense exagérée des locataires nuit à ceux-ci en rétrécissant l’offre des bailleurs privés, alors que les pouvoirs publics ne remplissent absolument pas leur rôle de créateurs de logements sociaux ou assimilés.
Copropriétés
Pendant toute son existence, le SNP se préoccupa des problèmes que rencontraient les copropriétés. Ce fut notamment le cas des concierges et de leur logement.
Dans les années 1980, à l’initiative du SNP, la commission paritaire des concierges d’immeubles à appartements est créée (com. 323).
Le SNP mit au point, à cette époque, un contrat spécifique pour les concierges. Le SNP siègera de nombreuses années au sein de la Commission paritaire 323 qui, au fil des années, étendra son champ de compétences pour comprendre tout le personnel des copropriétés pour ensuite être étendu aux bureaux de gestion immobilière, aux syndics et, ensuite, à l’ensemble des agents immobiliers.
Dans les années, 1980, des travaux importants dans les ascenseurs sont exigés pour les immeubles avec concierge et pas les autres (Protection des travailleurs).
Le SNP défendra l’emploi des concierges en considérant que la sécurité des ascenseurs ne peut se limite à concerner les personnes sous contrat d’emploi.
Ultérieurement, le SNP devra défendre l’ensemble des copropriétés suite à des travaux importants aux ascenseurs qui ont été imposés. C’était sous le « lobbying » des firmes d’ascenseurs.
En 2011, le Syndicat National des Propriétaires (S.N.P.) devient le Syndicat National des Propriétaires et Copropriétaires (S.N.P.C.). Il entend défendre l’ensemble des intérêts des copropriétés. Depuis lors, il intervient notamment pour aider les copropriétés qui se trouvent face à des syndics « indélicats ».
Dans les années 1990, le SNPC interviendra dans l’élaboration de la loi du 30 juin 1994 sur la copropriété et, ensuite, dans les lois des 2 juin 2010, 13 août 2011, 15 mai 2012, 18 juin 2018 et 4 février 2020.
7. Quels étaient les objectifs du SNPC lors de sa création ?
Obtenir des instances compétentes le rétablissement de l’adaptation des loyers à l’exacte proportion de l’index.
Empêcher la prorogation de la loi de blocage des loyers et intervenir pour que la péréquation cadastrale en cours ne soit pas le prétexte d’une taxation supplémentaire.
Nous opposer résolument aux mesures qui menacent directement la propriété privée immobilière telle que : extension des taxes sur la plus-value des biens immeubles, blocage des prix, majoration des centimes additionnels, des droits de succession, instauration d’un cadastre des fortunes annonciateur d’une taxe sur le capital.
Promouvoir un urbanisme humain et plus démocratique
Défendre le droit de propriété immobilière dans son ensemble en imposant les bailleurs comme « interlocuteur valable » et « obligé » pour l’élaboration de textes et réglementations concernant les propriétaires immobiliers.
Promouvoir l’accès du plus grand nombre à la propriété immobilière.
8. Le CRI : le journal des propriétaires
Il a paru indispensable, dès la création du S.N.P., que les membres et le public puisse être informé des actions, des objectifs et des services du S.N.P.
Nous pensons intéressant de reprendre quelques titres d’articles de chacun des 10 premiers numéros :
LE CRI n° 1 : Février 1976
Là ou disparait l’épargne meurt la liberté
D’abord un cri de colère
Le blocage des loyers ou l’injustice légalisée
LE CRI n° 2 : Mars-Avril 1976
L’épargne source de la propriété face à la surconsommation et au collectivisme.
Grand succès de la réunion des membres bruxellois le 12 mars 1976.
Pour une liberté dans la solidarité.
Le point quant au blocage des loyers.
Que faire ? Le cadastre vous demande le montant de vos loyers.
LE CRI n° 3 : Mai 1976
Photo manifestation SNP-Bruxelles le 12 mars 1976
Loi de blocage des loyers du 10 avril 1975
Position des partis face au blocage des loyers.
LE CRI n° 4 : Juin-Juillet 1976
Préavis de grève chez les propriétaires
Après les propriétaires-bailleurs bientôt ponction Fiscale des autres Propriétaires.
LE CRI n° 5 : Septembre 1976
Lettre ouverte au Ministre HERMAN
Nouvelles de nos trois régionales
Le S.N.P. interroge les partis
LE CRI n° 6 : Octobre 1976
Propriétaires, vous devrez bientôt passer à l’action.
Les propriétaires épargnants immobiliers ne sont pas des profiteurs.
Comment et pour qui voter ?
LE CRI n° 7 : Novembre 1976
Un syndicat des propriétaires. Pourquoi ?
Blocage des loyers - Préparons-nous à l’action.
LE CRI n° 8 : Novembre 1976- Edition spéciale
Halte à l’étatisation de la propriété
Appel à manifester à Liège le 19 novembre 1976 et à Bruxelles le 22 novembre 1976
LE CRI n° 9 : Décembre 1976
Eclatant succès de nos manifestations de Bruxelles et Liège
La propriété au gré des vagues politiques
Conclusions
Nous avons voulu rappeler les débuts de la création du Syndicat National des Propriétaires (S.N.P.) devenu maintenant le Syndicat National des Propriétaires et Copropriétaires (S.N.P.C.)
Nous devons malheureusement constater que la propriété immobilière est plus que jamais attaquée par diverses lois et réglementations auxquelles le S.N.P.C. s’attaque tant au niveau politique que par des recours en justice.
Les copropriétaires membres du S.N.P.C. doivent être conscients du fait que durant de nombreuses années, tant au niveau fédéral, régional que communal, des propriétaires bénévoles se sont dévoués pour défendre les objectifs fixés.
Remercions-les.